PROTOCOLES POUR DES

DEBATS CONSTRUCTIFS


Il est facile de débattre entre personnes ayant les mêmes idées, il l'est beaucoup moins d'écouter vraiment des besoins opposés aux siens ou contraires à ses préjugés.

Pourtant une vraie démocratie nécessite de se fédérer autour de projets réellement communs, sinon on va vers la guerre civile ou vers des formes édulcorées de celle-ci. Chez certaines tribus amérindiennes, les décisions étaient prises à l'unanimité : on se parlait jusqu'à ce que chacun soit intimement convaincu que l'on avait abouti à la meilleure décision pour tous. Ici, trop souvent, le leader le plus charismatique rallie autour de lui que ses idées soient bonnes ou mauvaises, simplement parce qu'il est est sécurisant.

Apprenons plutôt à argumenter solidement pour ne pas nous laisser endoctriner par des manipulateurs.

Et comme une partie de nos problèmes sociétaux est causée par des manques de dialogue et de réflexion, débattons vraiment, par exemple en ayant recours aux protocoles suivants, qui permettent que les débats ne tournent pas autour d'interlocuteurs envahissants et qu'ils débouchent plus facilement sur des actes.

Les débats de compétition (!)


Ce protocole fut utilisé dans certaines classes de langue dans les années 2000, donnant même lieu à des concours internationaux. Ils ne semblent guère plus être pratiqués alors qu'ils permettent de développer empathie et pensée complexe.

On part d'une affirmation ferme, par exemple : "le voile devrait être interdit". Le sujet doit être choisi de manière à pouvoir induire des arguments pour et contre d'une égale richesse.

L'animateur, qui peut ensuite jouer le rôle de l'arbitre, explique ce qui est attendu et les qualités qui vont permettre de faire remporter la compétition à son équipe ou d'être médaillé. Les critères peuvent concerner la prise de parole : chacun doit s'exprimer, le débit doit permettre d'être compris mais de ne pas ennuyer, le ton doit être expressif, l'humour peut être valorisé. On peut prioriser la qualité relationnelle : écouter les autres, ne pas s'autoriser d'attaques personnelles, prendre sa place, ne pas prendre toute la place. Ils peuvent se focaliser sur la qualité d'argumentation : cohérence, rationalité, syllogismes, hors-sujet, etc... Si le débat est utilisé pour faire parler une langue étrangère, le professeur énonce les critères linguistiques qui vont être retenus : débit, prononciation, grammaire, richesse du vocabulaire. Il consacre également un temps à la présentation du vocabulaire spécifique au sujet du débat et fournit une banque d'expressions ou de points de grammaire qui permettent d'exprimer ses idées.

Les participants sont ensuite répartis en petits groupes et travaillent sur des arguments pour et contre l'idée. Ils s'inspirent éventuellement de textes que l'animateur a pu collecter en amont et qui ne sont - si possible, pas les mêmes  dans chaque groupe - . Tout type de ressource est autorisé pendant ce temps de préparation.

Après un certain temps - de 30 minutes à 2 heures selon la difficulté du sujet, l'âge des participants et la langue de tenue du débat - , l'arbitre tire au sort les noms des participants qui vont défendre les arguments en accord avec l'affirmation de départ et ceux qui vont s'y opposer. Ce type de débat oppose donc des clans qui n'ont pas choisi l'opinion qu'ils allaient défendre. Personne ne sait qui exprime ses pensées personnelles et qui ne fait qu'argumenter pour tenter de faire gagner son équipe. Cela permet notamment d'éviter le développement d'animosités personnelles.

Les participants se répartissent ensuite selon les opinions qu'ils vont devoir défendre formant des groupes de quatre. Ils ont 15 à 25 minutes pour préparer une introduction et dresser une liste d'arguments et de questions à utiliser au cours du débat.

Une équipe de quatre participants "pour" est alors choisie pour faire face à une équipe de quatre participants "contre". On commence par les équipes les plus rapides, douées ou motivées. L'arbitre est assis entre les deux équipes, qui se font face à face. Ils forment un U qui permet que tous se voient. Les autres participants, assis face à l'arbitre, constituent le jury, en attendant d'aller débattre à leur tour.

Chacune des équipes présente son introduction du sujet puis l'arbitre pose à l'équipe « pour» une première question pour engager le débat.  Les échanges sont ensuite libres entre les deux équipes et durent de 20 à 35 minutes selon l'âge, les attentes ou la motivation. On rivalise en matière d'élocution, de respect, d'argumentation, d'imagination, etc...

Les débatteurs sont libres de leurs propos et de la direction qu'ils souhaitent prendre. Le jury ne peut intervenir. L'arbitre peut éventuellement relancer le débat ou recadrer la prise de parole si nécessaire.

Le jury écoute et remplit des grilles évaluant différents critères tels que la qualité de la langue utilisée, la pertinence des arguments, la cohérence de la pensée, la richesse de l'argumentation, la courtoisie, la clarté, la répartition de la parole entre chaque membre du groupe, la qualité d'écoute. Si l'on utilise ce type de débat pour enseigner une langue, les critères sont moins spécifiques en ce qui concerne la qualité de la pensée et ils le sont davantage en ce qui concerne la langue. Si l'on souhaite travailler des aspects relationnels, on peut fabriquer de petites pancartes, brandies pour fustiger des "attaques personnelles", un "non respect du tour de parole", une "monopolisation de la parole", etc... Si l'on souhaite travailler en priorité des aspects intellectuels, les pancartes données au public peuvent surgir en cas de "coq à l'âne", de "hors-sujet", d'"incohérence", de "manque d'exemples", etc...

A la fin du temps de débat, l'arbitre profite d'un blanc pour proposer une pause de 2 ou 3 minutes. Les équipes se concertent alors rapidement pour préparer une conclusion qui reprenne les points forts des arguments débattus. Chaque équipe présente ensuite sa conclusion et le débat est terminé.

Le jury vote alors en fonction des points forts  les fiches et désigne le groupe qui a été le plus convaincant et correct lors du débat.

C'est alors au tour des autres équipes de débattre face à tous.

On peut fabriquer de petits certificats ou médailles pour récompenser les participants qui ont recueillis les meilleurs scores sur les fiches dans les domaines que l'on avait choisi de prioriser ("diplôme de l'interlocuteur le plus à l'écoute", "médaille de l'interlocuteur le plus enthousiaste, etc...).

En classe de langue, il est intéressant de faire passer les élèves les plus en difficulté en dernier, car cela leur laisse le temps de s'inspirer des autres et de mieux intégrer le nouveau lexique. Cet exercice, très apprécié dès élèves, de la cinquième à l'université, peut tout à fait être évalué.



Quelques idées simples

Si l'on fait face à des personnes qui se coupent la parole, le recours à un bâton de parole peut être utile.

Le guide de l'utilisateur des forums ouverts offre des conseils de base pour des échanges constructifs.

Dans les world cafés, les participants sont invités à changer de table après de premiers échanges avec un petit groupe. Une personne reste à chaque fois et résume la conversation précédente aux nouveaux. Au terme du processus, les principales idées sont reprises au cours d'une assemblée plénière et les possibilités de suivi de la discussion sont envisagées.



Pour travailler sur les conséquences éventuelles d'un projet ou d'un choix, l'auteur Bernard Werber conseille de noter une hypothèse en bas d'un tableau, de dessiner un arbre des possibles partant d'elle et de noter, sous forme de branches, les conséquences prévisibles, puis les conséquences de ces conséquences. Un site permet de voir à quoi ce type d'arborescence peut mener et éventuellement d'y contribuer si on le souhaite. La réflexion devient alors pleinement collaborative alors que trop souvent elle est l'enjeu de conflits de pouvoir qui mènent à rester étroitement figé sur ses propres positions.




L'holacratie offre un modèle de gouvernance où les enjeux de pouvoir sont évités grâce à une organisation circulaire et non pyramidale. Cette méthode, ainsi que celle de la sociocratie, est utilisée dans de plus en plus d'entreprises, notamment pour faire remonter efficacement les bonnes initiatives et les projets. On peut s'inspirer de la gestion de la dynamique de groupe que ces approches préconisent.




Les protocoles ci-dessous permettent de réfléchir à la société que nous voulons vraiment


L'écueil courant dans ce domaine est de rester dans la critique sans réussir à formuler de volonté.

La pensée positive enseigne à formuler sous forme d'affirmation ce que l'on veut qu'il se produise dans sa vie. Sur le plan individuel, de plus en plus de personnes ont recours à cette technique, en revanche peu réalisent qu'elle est également efficace sur le plan sociétal.


Formuler ce que l'on veut précisément pour l'avenir


1 S'autoriser toutes les utopies et les explorer


Se relaxer et laisser parler son imagination et ses désirs pour répondre à la question suivante : en 2050 comment souhaitez-vous que soit le monde ?

Partager ses textes utopistes sur Internet et avec ses amis.

Recenser ensemble les décisions à prendre pour faire avancer cette utopie sur le plan individuel, municipal, départemental, régional, national, européen, planétaire. Détailler autant que possible.

Décider ce qui peut concrètement être fait dès aujourd'hui qui facilitera le changement souhaité pour demain.


2 Penser positif


Dresser la liste de tout ce qui va bien sur la planète, en Europe, en France, dans sa municipalité, dans son foyer.

Discuter avec des sociologues ou des historiens des tendances sources d'espoir qui se dessinent à travers les temps.

Exemple :

Au niveau planétaire

- Confort matériel pour 90% des habitants des pays riches (nourriture, chauffage, eau courante...)

- Education gratuite et obligatoire (en théorie) dans la majorité des pays.

- Equipes de soins

- Outils pour la démocratie (journaux, livres, internet...)

- Meilleure connaissance des cultures étrangères

En France

- Tissu associatif le plus riche au monde (700000 associations)

Dans les pays riches

- Un désir de respecter les enfants, les femmes et auprès d'une minorité grandissante, les animaux.

- Le souci de préserver les plus faibles ( pauvres, handicapés, malades mentaux...)

- Le souci d'une justice internationale

- La volonté de préserver l'environnement

Dans les pays du Tiers-Monde

- Volonté de préserver leur culture

- Désir d'autonomie


Que peut-on faire pour amplifier ces tendances positives ?


3 Tester la solidité de ses propositions


Choisir un ou plusieurs projet d'amélioration sociale. Puis présenter dans le détail ce projet, ses questions éventuelles et les besoins générés. Le reste du groupe reste d'abord silencieux. Le groupe pose ensuite des questions pour mieux comprendre mais s'abstient de tout commentaire positif ou négatif. On s'absente alors et le reste du groupe envisage les suggestions, conseils, aides qu'ils vont pouvoir offrir pour aider à réaliser ce projet.

On revient et on reste silencieux alors que chaque membre du groupe expose ses suggestions. Il y a enfin un échange de questions-réponses. On évite de ne dire "oui, mais..." et on s'efforce d'accueillir favorablement les propositions, dans un premier temps. On peut ensuite synthétiser et échanger librement.



4 Réfléchir aux implications des évolutions envisagées


Pour chacune des améliorations souhaitées, dresser la liste de ce que les hommes doivent créer, modifier, garder et abandonner pour atteindre ces objectifs.

Même question en remplaçant « les hommes » par « moi et mes proches ».

Compléter à plusieurs des tableaux comme celui ci-contre au sein d'associations, de partis politiques, de familles, d'écoles.

NB : dans la partie du tableau intitulée : « ce qu'il faut créer », il est intéressant de réfléchir à toutes les implications aux niveaux local, régional, national et européen.


Comprendre ce qui freine les changements


1  Recenser les croyances qui constituent des freins au passage à un "monde meilleur"

Exemples:

- Hypnose des médias.

- Sensation d'être isolé.

- Humilité.

- Dictons castrateurs : "On ne va pas refaire le monde", "C'est la vie".

- Croyance que le pouvoir de décision est dans les mains : des riches, des patrons, des politiciens, des Blancs, des autres en général...

- Sensation que la tâche est trop vaste, les problèmes trop nombreux.

- Concentration de l'énergie sur des problèmes personnels (travail, couple, enfants, maison, santé...)

Explorer les causes profondes de ces freins.

Les spécialistes du comportement humain, les sociologues et les historiens seront les plus à même de réfléchir sur ces questions.

Proposer des parades à ces freins ou des façons de les détourner.

Penser à communiquer ses découvertes (amis, journaux, net, thèses...) !



2  Inventorier les besoins et désirs humains contradictoires qui génèrent des problèmes sociétaux

Réfléchir aux axes de tension irréductibles car inhérents à la nature humaine et imaginer comment les utiliser plutôt que les subir.

Etudier chacune des modifications souhaitées pour le monde et imaginer quels besoins humains contradictoires vont complexifier leur mise en opération.

Exemples :

- Désir de confort matériel s'opposant au désir de ne pas polluer.

- Désir d'être le meilleur s'opposant au désir que tout le monde soit traité en égal.

- Désir de transformer le monde s'opposant à un besoin d'être tranquille ( action/ paresse)

- Besoin d'être accepté tel que l'on est mais incapacité de ne pas rejeter l'autre quand il s'écarte du comportement attendu.

- Besoin de sécurité et besoin de ne pas être surchargé par une hyper-bureaucratisation préalable à toute activité visant à la sécuriser au maximum (exemple: normes imposées aux agriculteurs, dans l'alimentaire, etc...)

Faire comprendre autour de soi que les problèmes mondiaux ne sont pas causés par le machiavélisme d'hommes prétendument mauvais mais par des tensions internes liées à des besoins humains contradictoires, partiellement réconciliables avec un peu de créativité.


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